MEDEF

Courrier commun CFTC, CFDT, CFE-CGC, UNSA, MEDEF, CPME, U2P, FNSEA

Courrier commun CFTC, CFDT, CFE-CGC, UNSA, MEDEF, CPME, U2P, FNSEA
  • Source : CFTC, CFDT, CFE-CGC, UNSA, MEDEF, CPME, U2P, FNSEA
  • Crédits photos : CFTC, CFDT, CFE-CGC, UNSA, MEDEF, CPME, U2P, FNSEA

La France sort lentement d’une crise sanitaire qui n’a pas fini ses ravages à travers l’Europe et le monde pour rentrer dans une crise économique dont nul ne peut mesurer aujourd'hui ni l’ampleur, ni la durée, ni les conséquences.

Dans ce contexte d’incertitude et d’inquiétude fortes, les postures traditionnelles peuvent pousser à l’affrontement. Nous sommes convaincus qu’il faut, pour résoudre les difficultés qui commencent, un autre état d’esprit et une logique différente. L'objectif, et également la méthode, doivent être d’installer entre nous des relations de confiance mutuelle, sur la base de notre volonté partagée de voir le pays sortir de cette période de crise économique en ayant préservé ses entreprises, ses emplois, et évité une crise sociale.

Nous pensons donc que les partenaires sociaux, représentants légitimes des employeurs et des employés, ont un rôle majeur à jouer pour imaginer des solutions.

Nous avons pour cela pris le parti de partager entre nous, avec franchise, nos points d’alerte et nos inquiétudes et de discuter ensemble de priorités communes. Le devenir des services publics essentiels à tous en est une. La société dans son ensemble a un besoin vital de ces services publics, mais leur maintien dépend de la vitalité de la société et de la solidité de l’économie, qui repose sur l’activité des entreprises. La question de la protection sociale dans son ensemble doit pouvoir être traitée avec le même regard.

Sur ces sujets prioritaires, nous souhaitons engager, avec volontarisme et pragmatisme, un travail de réflexion et d’élaboration de propositions capables de répondre aux exigences de l’après pandémie, en restant attentifs aux attentes profondes de la société. Ces propositions devront pouvoir conduire entre organisations à des ententes, à des accords, qui mettront en œuvre des réponses concrètes.

Ce travail s’articulera autour de plusieurs grandes convictions. La situation économique et sociale est difficile, cependant quatre mois d’urgence sanitaire n’ont pu ruiner les fondamentaux de notre économie ni mettre à bas notre système de solidarité.

Notre pays a démontré sa capacité à résister aux chocs, même si cela n’a pas été sans difficulté. Dans un temps extrêmement court, des mesures d’urgence ont été prises pour affronter la pandémie, pour la maîtriser, et pour répondre aux conséquences économiques et sociales de ces décisions exceptionnelles. Les moyens nécessaires ont été dégagés. La France a su se mobiliser et trouver des réponses au sein d’une Union Européenne qui s’est montrée dans un premier temps divisée. Notre système de santé, en particulier l’hôpital public, déjà fortement mis sous tension avant l’apparition du virus, a résisté à la situation extrême provoquée par l’afflux de malades du Covid-19. L’État est intervenu de manière forte et concertée avec le monde de l’entreprise. Nos formes d’organisation collective, nos services publics et notre système social, placés dans un contexte peu favorable de profondes transformations, ont fait globalement la preuve de leur efficacité.

Le redémarrage de l’économie nécessite des actions de relance économique et sociale.

La priorité est aujourd’hui à une reprise de l’économie fondée sur l’activité des entreprises. C’est elle qui garantit le mieux les emplois. Les mesures évoquées ont en effet protégé momentanément les entreprises et les salariés en différant de nombreuses échéances. Le retour à la normale n’en sera que plus difficile. 

Le soutien à l’économie devra prendre la pleine mesure des difficultés et aura la mission difficile d’innover par rapport aux plans de relance précédemment adoptés, qui cherchaient à répondre à des crises directement provoquées par des dysfonctionnements économiques ou financiers. La question des programmes d’investissement à conduire, de leur nature, de leurs objectifs, fait partie de ce débat.

Relancer l’économie soulève la question des politiques de compétitivité favorisant l’investissement, éventuellement différencié, dans les secteurs qui auront été reconnus stratégiques, et d’une éventuelle relocalisation de tout ou partie de la production dans ces secteurs.

La relance doit s’appuyer sur « une économie durable » qui répond aux attentes de la société et affirme sa capacité d’anticipation et d’adaptation aux crises.

La relance de l’économie, pour être réellement ambitieuse, nécessite de se poser la question de la cohésion de la population en France, de sa capacité à faire vivre, dans ses aspects économiques et sociaux, un projet commun porteur de sens pour tous. Une part de la réponse passera par un investissement dans l’éducation et les politiques pour la jeunesse, voie indispensable pour partager un projet de société conciliant performance économique, justice sociale et transition écologique. Les acteurs économiques doivent bénéficier d’un cadre clair et de moyens pour accélérer cette transition, en particulier dans le cadre de la lutte contre le changement climatique, et développer « l’économie verte ».

Cette période doit être mise à profit pour rechercher de nouveaux modèles économiques, en accompagnant les acteurs durant cette phase et en marchant à un rythme adapté à l’évolution de la consommation. Cet accompagnement, notamment à travers la mobilisation de la recherche et de l’innovation, devra donner aux acteurs économiques les moyens d’accentuer la transition écologique.

La relance de l’activité de production de biens de première nécessité a montré que la délégation à d’autres de la production avait aussi ses limites. La relocalisation qu’il faut envisager doit s’accompagner d’une réflexion et de mesures destinées d’une part à faciliter la montée en gamme des productions concernées, afin qu’elle soit porteuse de réelle valeur ajoutée, respectueuse de l’environnement et des travailleurs, et d’autre part à renforcer toutes les gammes de produits, particulièrement dans les secteurs stratégiquement prioritaires tels que la santé ou l’alimentation, pour sortir de la situation de dépendance.

La relance nécessite la cohérence et l’équilibre des politiques économiques, sociales et environnementales.

La crise a également mis en lumière et accentué la vulnérabilité des personnes éloignées du cœur de notre modèle économique et de protections sociales (travailleurs précaires, certains indépendants…) ou fragilisées par des facteurs physiques ou sociaux (dépendance et handicaps, victimes de violences intrafamiliales, sans-abris, migrants, etc.) ; ce qui appelle des adaptations de notre protection sociale.

Elle a révélé des métiers à forte valeur ajoutée sociale et humaine qui méritent une plus grande reconnaissance sociale et économique de la nation.

Sur notre champ de compétence nous faisons le choix de donner du « sens » au travail, valeur « sûre » et précieuse dans ses dimensions humaines, comme facteur de dignité et d’épanouissement, économique, comme garant d’une autonomie, et sociale, comme base de notre système de relations professionnelles et d’une grande partie de la protection sociale.

Parallèlement, il faut donner du « sens » au capital, pour garantir la souveraineté européenne et nationale, pour réparer les fragilités en matière d’approvisionnement hors de l’espace européen et hors du territoire national et pour participer à la transition écologique indispensable, sans détruire le travail et avec des formes de croissance durable.

Le combat prioritaire est le combat pour l’emploi.

Le combat prioritaire, c’est l’emploi. Ce combat est essentiel pour la société. Il ne se gagnera qu’avec les entreprises, leurs salariés et l’ensemble des partenaires sociaux.

Si tous les emplois mériteraient d’être sauvés, il faut admettre que les circonstances ne permettront pas de les sauver tous par l’activité. Là aussi l’innovation pourrait permettre de moderniser les protections sociales existantes.

Favoriser le dialogue économique et social dans les branches, les territoires et les entreprises, pour développer un travail de qualité.

Les solutions à la crise qui pourront émerger grâce au dialogue social naîtront principalement dans les entreprises et les branches.

Dans un monde ouvert, que nous appelons de nos vœux, car il est la voie de la solidarité et de la fraternité, la reconstruction passera aussi par une capacité à créer de l’activité et de la richesse sur nos territoires, en privilégiant l’emploi local. La mise en valeur des retombées positives d’une production locale, génératrice d’emplois pérennes et de qualité ancrés dans les territoires, encouragera par ailleurs la consommation durable et soutenable des produits, biens et services sur notre territoire et favorisera le partage de la richesse crée. Le dialogue avec les collectivités locales doit être favorisé pour faire émerger des projets adaptés à chaque territoire et créer des dynamiques locales indispensables aux équilibres territoriaux.

Le rôle des partenaires sociaux est d’agir avec toutes les forces de ce pays, dans le respect de leur indépendance mutuelle.

Si les entreprises ont besoin d’être compétitives, souples, réactives, les salariés doivent être mieux formés aux enjeux du futur et protégés face à l’accélération des mutations. Toute refondation du « pacte » entre l’entreprise et les salariés nécessite de tenir la balance égale entre les devoirs des unes et des autres.

L’amélioration de la participation des salariés à la vie des entreprises par la modernisation du dialogue social, l’évolution de la relation employeur-salarié, l’innovation dans ces domaines, sont des enjeux actuels qui relèvent pleinement du rôle des partenaires sociaux. Ceux-ci doivent aussi, le plus largement possible, prendre part aux débats sur la sortie de crise comme sur les grands sujets économiques, sociaux et environnementaux, et agir avec toutes les forces vives pour faire émerger des solutions nouvelles. C’est pourquoi le dialogue national interprofessionnel mais également au niveau européen, doit être relancé.

La pandémie nous interpelle sur le rôle de l’Europe et la mondialisation.

La crise interpelle les pouvoirs publics et les citoyens sur la capacité de l’Europe et de la France à prendre ou à reprendre en mains leur destin économique dans des secteurs stratégiques. La mondialisation de la production et des échanges telle que nous la connaissons a révélé parfois brutalement ses faiblesses. La capacité de résistance, de réaction et d’adaptation du système économique, des entreprises et des organisations de toutes natures est en question face à un évènement de ce type.

Il devient dès lors souhaitable de réfléchir à quel échelon établir ou rétablir une souveraineté protectrice sur des domaines stratégiques à définir. L’échelon européen apparaît comme le plus adapté pour catalyser les énergies, fédérer les politiques qui sont indispensables (santé, alimentation, énergie), en menant des politiques cohérentes sur les ouvertures d’accords commerciaux internationaux et en matière de respect des normes concernant les importations.

En ce moment inédit dans l’histoire récente, nous pensons essentiel de rappeler ensemble que nos organisations, au-delà de la défense des intérêts de leurs membres, ont aussi un rôle à jouer dans l’intérêt général que nul responsable ne peut ignorer. Nous avons des réflexions à partager, des idées à échanger et confronter, des propositions à débattre, des solutions à construire. C’est ainsi que nous contribuerons ensemble à la sortie de crise efficace et juste dont notre société a besoin. Nous affirmons aujourd’hui collectivement notre volonté d’engagement et notre conviction qu’un dialogue renforcé est  l’une des conditions du succès.